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Suivons l’exemple schématique que donne [Maynard Smith, 1982] (p. 45-46) pour expliquer comment la sélection naturelle peut augmenter l’adaptation de l’espèce à son milieu. Il s’agit de l’exemple d’une population de souris formée à moitié de souris grises et à moitié de souris blanches (nous allons supposer que ces deux types de souris peuvent se reproduire ensemble). Chaque génération de souris ne vit qu’une saison et, à la fin de la saison –au prochain printemps, par exemple– elle est complètement remplacée par la génération suivante. Sur chaque génération qui naît, les hiboux prélèvent leur dû avec les proportions suivantes : des souris blanches sont tuées par les hiboux tandis qu’ils n’arrivent à attraper que des souris grises (qui arrivent à se camoufler plus facilement dans ce milieu). Par ailleurs, il existe aussi d’autres facteurs de mortalité qui ne sont pas liés à la couleur (maladies par exemple) et qui prélèvent une proportion des souris non tuées par les hiboux. Les survivants arrivent à l’âge adulte et se reproduisent en mettant au monde descendants par couple. Les mères transmettent leur couleur à la génération suivante. Nous pouvons facilement étudier l’évolution des deux populations dans un tableau (Tab. 6.1↓). En partant d’une population initiale de 200 souris dont la moitié est de couleur grise, nous pouvons étudier les prélèvements qui sont effectués par les hiboux et les autres causes. Les couples survivants de la première génération donnent alors naissance à une nouvelle génération de souris dont sont grises. On voit bien qu’à la génération suivante la proportion des souris les mieux adaptées va encore augmenter de sorte qu’à terme, sauf changement de l’environnement, cette variété va dominer la population. Ce petit exemple démontre donc le fonctionnement de la sélection naturelle.
Un autre mérite de cet exemple est de montrer que la sélection naturelle ne peut être le seul mécanisme en jeu. En effet, notre population de souris s’adapte de mieux en mieux à son environnement et augmente par conséquent, mais elle finirait par être complètement homogène, uniquement formée de souris grises si la sélection était le seul mécanisme d’évolution. Or la question initiale que Darwin pose porte sur la variabilité des espèces, sur l’apparition, notamment, de toutes les variétés de pinçons des îles de Galápagos, au contraire de cette uniformisation. Ce point est important car les analyses dynamiques en économie se basent souvent sur une dynamique de diffusion de ce type, avec comme résultat, la domination de la population par une seule variété (une seule technique, souvent la meilleure, par exemple). La dynamique complète de l’évolution comprend nécessairement un autre mécanisme tout aussi important que la sélection.
En effet, l’uniformisation est évitée dans la Nature grâce à l’introduction des variations pendant la reproduction : les descendants ne sont pas toujours identiques aux parents. Darwin était bien conscient de ces variations même s’il ne connaissait apparemment pas les travaux de Gregor Mendel sur l’hérédité. L’introduction de l’hérédité et de la biologique moléculaire (la génétique) va conduire à ce qu’on appelle la théorie synthétique de l’évolution. Ce qui est à retenir à notre niveau est le fait que l’évolution est un phénomène au niveau des populations et, plus particulièrement, au niveau de la réserve de gènes de la population. Les mécanismes qui introduisent la variété sont bien connus maintenant et on les regroupe sous le terme de mutation. Ainsi, l’introduction de la génétique permet la distinction du génotype de l’individu (l’ensemble de ses gènes) de son phénotype (l’expression physique de ces gènes) et de comprendre que les variations sont introduites au niveau du génotype (mutations pendant la copie de l’ADN), tandis que la pression sélective s’exerce sur le phénotype correspondant.
Il ne nous est pas nécessaire de développer plus en avant les mécanismes exacts de l’évolution biologique et les controverses qui les concernent (même s’il existe bien un consensus assez fort sur la majeure partie de ces mécanismes) car l’approche évolutionniste en économie ne peut être basée sur une analogie simple avec le biologique, mais sur la reconnaissance de ce qui est en commun entre l’évolution des espèces et la dynamique économique, du fait de leur nature commune de SCA.
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