Section 14.8: Quand Keynes rencontre Minsky : le rôle potentiel de la régulation financière Up Chapitre 14: Dynamique macroéconomique Chapitre 15: Conclusions et perspectives 

14.9Last but not least : Impacts environnementaux des dynamiques économiques

Les modèles macroéconomiques que nous avons considérés jusqu’ici (et ceux en général considérés dans la littérature standard) sont en fait assez particuliers car ils font complètement abstraction de la dimension énergétique des dynamiques économiques et de leurs conséquences sur l’environnement naturel de ces dynamiques. Ce cadre d’analyse devient bien sûr de plus en plus en décalage avec les priorités environnementales qui s’imposent de manière aiguë à nos sociétés.
Les caractéristiques des MMA que nous avons soulignées dans ce qui précède en font un outil particulièrement bien adapté pour analyser les dynamiques intégrées entre la sphère économique et la sphère naturelle de nos sociétés et pour étudier l’impact potentiel des politiques énergétiques et environnementales alternatives comme le montre [Balint, 2017].
Dans cet objectif, [Lamperti, 2018] étend le modèle K+S de manière à intégrer les dimensions énergétiques et de changement climatique (voir Fig. 14.3↓) et à étudier l’impact de différentes stratégies pour faciliter une transition énergétique pour la société. La production de biens et d’énergie induisent alors l’émission des gaz à effets de serre et ces gaz ont une influence non-linéaire sur la dynamique des températures. L’augmentation des températures provoque alors des dommages (qui sont donc endogènes dans ce cas) et réduisent la productivité de la main d’oeuvre et l’efficacité énergétique.
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Figure 14.3 Interactions Economie-Energie-Climat dans [Lamperti, 2018]
L’article montre que le modèle est capable de générer des dynamiques économiques et climatiques respectant les faits stylisés observés empiriquement sur ces dimensions et étudie les dommages potentiels résultant des impacts climatiques à travers huit scénarios sur leurs effets : la baisse de la productivité de travail ; la baisse de l’efficacité énergétique ; la destruction du stock de capital ou des stocks de biens et des combinaisons de ces différents effets. Les résultats des simulations montrent que les deux premiers effets ont les conséquences les plus défavorables sur le système économique. La prise en compte de canaux multiples pour les effets économiques du changement climatique fait aussi apparaître la possibilité que ces effets négatifs soient bien plus forts que ceux obtenus dans d’autres modèles à évaluation intégrative de ces dommages. Ce modèle est assez complet pour conduire une comparaison de différentes politiques possibles, comme cela est fait dans une version quelque peu plus simple, proposée dans [Gerst, 2013], qui montre que les stratégies de taxe carbone peuvent réduire les émissions de gaz, mais leurs effets en termes de réduction d’émission et de préservation de la croissance économique seraient les meilleurs si ces politiques possèdent une composante en termes de R&D.
Construits pour intégrer les niveaux micro–méso–macro, les MMA macroéconomiques semblent aujourd’hui avoir atteint un niveau de maturité qui leur permet désormais de reconsidérer toutes les dimensions des dynamiques économiques de manière intégrée, et au delà, de construire une représentation complète des impacts de ces dynamiques sur l’évolution de nos sociétés. Il devient alors possible d’avoir une évaluation plus complète des politiques économiques, sociales, environnementales et d’en concevoir de nouvelles, plus innovantes et à la hauteur des enjeux auxquels nos sociétés sont actuellement confrontées.

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(c) Murat Yildizoglu, 2021-