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L’analyse évolutionniste des organisations économiques favorise une approche qui met l’accent sur la capacité des organisations à résoudre des problèmes et elle suppose vérifiées les conditions d’une compatibilité minimale des incitations. L’existence d’une pression sélective génère en effet assez naturellement un lien plus ou moins étroit entre les performances et les récompenses dans l’organisation [Dosi, 1994]. La dynamique de l’organisation est alors déterminée non pas par un alignement des contraintes d’incitation, mais par l’articulation des savoir-faire individuels (skills) dans les routines et les compétences de l’organisation. Cette articulation détermine à son tour les aptitudes (capabilities) globales de l’organisation. L’ensemble des routines de l’organisation est ainsi le lieu où cette articulation se cristallise. Les compétences correspondent à des sous-ensembles d’aptitudes (cf.[Dosi, 2003]) qui, une fois articulés, donnent vie aux aptitudes globales (les compétences commerciales venant compléter les compétences productives pour mettre en place des aptitudes à occuper le marché d’un produit novateur, par exemple).
A un niveau relativement agrégé, l’évolution de ces compétences dépend doublement de l’effort d’innovation de la firme. Quand elle investit en R&D, la firme cherche à développer de nouvelles compétences mais cet effort améliore aussi une caractéristique plus structurelle de la firme : sa capacité d’absorption[Cohen, 1989, Cohen, 1990] qui correspond à sa capacité à bénéficier de la connaissance développée à l’extérieur de sa structure, par ses concurrents au sein de l’industrie ou par d’autres partenaires et sources de connaissances comme la recherche publique.
L’ouverture de la boîte noire de la firme permet d’affiner considérablement l’analyse des déterminants de la dynamique organisationnelle et du rôle de l’apprentissage, et de ses différentes modalités. L’éclaircissement des différents chaînons de l’articulation que nous venons de considérer nécessite encore beaucoup de travaux empiriques et théoriques. Les différents rôles que jouent les routines (voir ci-dessus et [Nelson, 1982]) leur donnent un rôle central dans cette dynamique. Les routines sont non-seulement la cristallisation des savoir-faire individuels, elles sont aussi le lieu où l’apprentissage collectif se réalise, où l’articulation entre l’apprentissage et la gouvernance de l’organisation se met en œuvre (cf.[Coriat, 1998]). L’évolution de l’organisation correspond à une dynamique continue de cristallisation de nouveaux savoir-faire résultant de la résolution des problèmes, articulée avec une dynamique des structures de gouvernance établissant la trêve sociale nécessaire pour la mise en œuvre de l’ensemble de ces routines, en vue de mobiliser les aptitudes globales de l’organisation face à la pression sélective de son milieu. Nous pouvons alors aborder plus finement les problèmes de la dynamique industrielle en prenant conscience des complémentarités qui existent entre les différentes dimensions organisationnelles et du rôle fondamental joué par la dépendance au sentier dans cette dynamique.
Il devient alors possible de s’interroger sur la performance des différentes formes organisationnelles.
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