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2.3 Le paradoxe de la productivité

Solow, R., 1957, ``Technical Change and the Aggregate Production Function'', Review of Economics and Statistics, 39, 312-320. Sans la productivité technique, l'accumulation du capital finit par subir les rendements décroissants. Le progrès technique implique une amélioration continue de la technologie qui permet d'éliminer l'effet des rendements décroissants en renforçant la productivité du travail. Cela conduit alors à une croissance per capita dans le modèle avec PT. L'article de 1957 cherche à évaluer empiriquement ces effets. Solow part de la fonction de production suivante

$\displaystyle Y=BK^{\alpha}L^{1-\alpha},
$

$ B$ représente un PT neutre à la Hicks. Nous obtenons alors (via la dérivation logarithmique)

$\displaystyle \frac{\dot{Y}}{Y}=\frac{\dot{B}}{B}+\alpha\frac{\dot{K}}{K}+\left(
 1-\alpha\right) \frac{\dot{L}}{L}.$ (2.16)

Cette équation indique que le taux de croissance du PIB résulte de la moyenne pondérée du taux de croissance des facteurs, complétée par le taux de croissance de $ B$ (le progrès technique). Ici le progrès technique ne renforce pas un facteur particulier mais la productivité totale des facteurs (PTF). L'étude statistique de cette équation devrait permettre de préciser le rôle des différents éléments dans la croissance (une comptabilité de la croissance). Le tableau suivant donne le taux de croissance aux EU entre 1960 et 1990.

$\displaystyle %%
\begin{tabular}[c]{ccc}\hline
P\'{e}riode & $\dot{Y}/Y$\ & $...
... $2.6$\ & $1.5$\\ \hline
$1960-90$\ & $3.1$\ & $1.4$\\ \hline
\end{tabular}
$

Ce tableau montre clairement un ralentissement de la croissance pendant les années 70. Comment cette évolution peut-elle être expliquée par l'évolution de la contribution des différents facteurs? Est-elle due à un emploi plus faible, ou une érosion du stock de capital? Pour répondre à ces questions, il faut étudier statistiquement l'équation précédente. Le tableau suivant utilise $ \alpha=1/3$ pour calculer l'effet des deux facteurs.

$\displaystyle %%
\begin{tabular}[c]{cccccc}\hline\hline
& & \multicolumn{3}{c...
...0$\ & $3.1$\ & $0.8$\ & $1.2$\ & $1.1$\ & $1.4$\\ \hline\hline
\end{tabular}
$

Ce tableau indique que sur la période 1960-90, les E.U. ont observé un taux de croissance annuel moyen de $ 3.1\%.$ $ 0.8$ de ces $ 3.1$ points étaient dû à l'accumulation du capital $ \left( \alpha\cdot\dot
{k}/k=0.8\right) ,$ $ 1.2$ étaient dû à la croissance de l'emploi et $ 1.1$ restant ne peuvent être expliquée par l'évolution de l'utilisation des facteurs. Une interprétation possible est la croissance de la productivité totale des facteurs $ \left( PTF\right) ,$ ou le progrès technique $ \left( B=A^{1-\alpha}\right) $. Le tableau indique aussi la cause de la faiblesse de la croissance suite au premier choc pétrolier: le ralentissement de la productivité des facteurs qui passe de $ 1.9$ à $ 0.2$ ce qui conduit à une taux de croissance per capita de $ 0.4\%.$ On observe aussi que cela s'est accompagné d'une augmentation de l'emploi sur cette période. Le stock de capital reste assez stable sur la totalité de la période. La $ PTF$ ne retrouve pas son niveau des années $ 60$ même si elle augmente dans les années 80. Il y a donc une sorte de paradoxe ici: l'utilisation des facteurs augmente mais cela ne se traduit pas par une croissance plus importante. Plusieurs explications ont été proposées pour le ralentissement de la productivité. La plus connue souligne le rôle joué par l'augmentation du prix de l'énergie suite au choc pétrolier. Mais cette explication est contredite par le fait que le prix de l'énergie, en termes réels, était plus faible vers la fin des années 80 qu'avant le choc. La productivité aurait dû revenir vers le rythme d'avant le choc. Une autre explication se base sur la modification de la distribution sectorielle de l'emploi: le poids du tertiaire a augmenté or la productivité est traditionnellement plus élevée dans le secteur manufacturier. Cela est d'autant plus vraisemblable que la productivité a retrouve, durant les années 80, son rythme d'antan dans le secondaire. Celle-ci peut aussi être complétée par la réduction des dépenses de R&D dans les années 60. Néanmoins, nous n'avons toujours pas une explication satisfaisante du ralentissement de la croissance. Une autre application intéressante de cette comptabilité concerne la croissance rapide des nouveaux pays industrialisés (NPI): Corée du Sud, Hong Kong, Singapore et Taiwan. Les taux de croissance moyen de ces pays (voir l'exemple de Taiwan) sont supérieurs à $ 5\%$ pendant la période 1960-90. Il est possible de montrer que la plus grande partie de cette croissance est due à l'accumulation des facteurs: une augmentation de l'investissement en capital physique, l'éducation, une participation plus forte à l'emploi et un transfert de l'agriculture vers le secondaire (Young(1995)). Le progrès technique semble jouer un rôle beaucoup plus limité. La croissance rapide de ces pays peut donc être expliquée dans le cadre du modèle de Solow.
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Yildizoglu Murat
2001-12-15