LA CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LE RESTE DU MONDE AU XXième SIECLE
SCHLINK Geneviève:
Licence - filière APE - 1999
Avant de commencer il faut noter deux choses. La première c'est que l'on va faire une distinction entre le Tiers Monde à économie de marché et le Tiers Monde à économie planifiée. Ceci explique entre autre le fait que l'on développe séparément l'évolution de la Chine. Puis il faut remarquer qu'on traite seulement l'évolution du reste du monde jusqu'en 1995. Le travail est divisé en deux parties. La première traite l'évolution du Tiers Monde. On va y exposer les fortes divergences qui existent entre régions, pays et individus et l'écart croissant avec les pays occidentaux. Cette dernière constatation va particulièrement nous intéresser car en étudiant l'évolution du Tiers Monde on va essayer de voir pourquoi il n'a pas réussi à rattraper son retard. On va donc d'abord analyser l'évolution et la part relative des trois secteurs de l'économie ainsi que l'évolution du commerce extérieur. Puis on va voir les obstacles majeurs que le Tiers Monde a connus et enfin l'évolution positive de l'enseignement.
Dans la deuxième partie on va analyser la croissance d'une économie planifiée en Russie ainsi que ses problèmes de passage au système de marché. Pour finir on évoquera les différents facteurs responsables de la forte croissance au Japon.
2 La croissance économique dans le Tiers Monde
2.1 Une croissance inégale entre régions, pays et individus
Pendant la période de 1900/50 on a une hausse du PNB par habitant de 0.2% dans le Tiers Monde qui correspond à une croissance faible et irrégulière. Entre 1950/80 cette hausse est de l'ordre de 2.2% on a donc une nette accélération de la croissance. Si on compare ces taux aux taux occidentaux ceux-ci sont extrêmement élevés car dans le premier siècle de démarrage l'Occident a connu une hausse de 1% du PNB par habitant. La décennie suivante est caractérisée par un net ralentissement de la croissance qui n'a pourtant pas touché la Chine qui connaît depuis 1950 une croissance plus rapide que le Tiers Monde à économie de marché. Enfin de 1990/95 on renoue avec une croissance de 1.1%.
On aperçoit pourtant de fortes inégalités entre régions. Pour la période 1990/95 l'évolution la plus positive se reflète en Asie où le taux de croissance du PNB par habitant atteint les 6%. En Afrique par contre on a le taux le plus faible, -1% et en Amérique latine il est de l'ordre de 1.1%. Ainsi la période la plus faible en terme de croissance économique était pour l'Afrique entre 1972 et 1992 tandis que celle de l'Asie se situait entre 1938 à 1950 et celle de l'Amérique latine dans les années 80.
Les fortes inégalités de croissance entre pays s'accroissent même avec le temps car souvent les pays les plus pauvres progressent plus lentement. On s'aperçoit que dans la période de 1900/50 la différence par continent est en général plus marquée que la différence entre les pays à l'intérieur d'un continent. Mais pendant la période 1950/1970 les dispersions augmentent surtout en Asie ou les quatre dragons se développent. Les années 80 et la période 1990/95, est particulièrement négative pour l'Afrique Noire. Ainsi de 1990 à 1995 c'étaient surtout dans l'ordre décroissant la Chine, la Thaïlande, la Corée du Sud, le Chili, le Taïwan et l'Indonésie qui ont connu de forts taux de croissance du volume du PNB par habitant.
Il existe aussi de fortes inégalités entre individus, qui étaient moins importantes pour le monde développé occidental au même stade de développement. Ainsi l'écart en Chine est de 8 à 15 tandis qu'en Occident il était de 6 à 8. Les inégalités entre individus dans les pays communistes sont pourtant moins importantes.
2.2 Un écart croissant entre pays développés et le Tiers Monde
Même si depuis les années 70 la croissance dans les pays développés occidentaux a diminué, l'écart entre pays développés et pays du Tiers Monde est en progression. L'écart entre pays développés (on inclut les pays de l'Est) et pays du Tiers Monde est plus faible à cause du fort recul des pays ex communistes dans la première moitié des années 90 et à cause de la forte croissance de la Chine. Et l'écart entre pays les plus développés et pays les moins développés du Tiers Monde qui ne cesse d'augmenter.
2.3 L'évolution du secteur agricole
L'agriculture a un caractère dualiste à cause de la colonisation. Elle peut être séparée en cultures d'exportation, où le système des plantations domine et où des technologies avancées sont utilisées et en cultures vivrières qui sont exploitées à l'aide des technologies traditionnelles quelque fois primitives. Les cultures vivrières occupent l'essentiel des terres agricoles. L'agriculture vivrière est le secteur le plus important en terme d'emploi mais malheureusement on utilise les meilleures terres pour les cultures d'exportations. En 1990 55% contre 76,1% en 1950 de l'ensemble de la population active du Tiers Monde à économie de marché était occupée dans le secteur agricole, un taux de 66% en Afrique, de 25% en Amérique latine et de 58% en Asie. Le secteur agricole est donc toujours très important en Afrique et en Asie. On va d'abord traiter l'évolution des cultures tropicales qui sont essentiellement des produits d'exportations.
2.3.1 Les cultures tropicales
2.3.1.1 Une évolution positive jusqu'aux années70
Entre 1900 et 1930 la production de produits tropicaux augmente de 2.7% par an. Malgré une diminution de la demande extérieure des pays développés occidentaux lors de la première guerre mondiale. Cette augmentation est due à la poursuite de la production de produits traditionnels tels que le sucre, le coton et le café ainsi qu'à l'apparition massive d'autres produits tel que les bananes, le caoutchouc et les oléagineux. La production de caoutchouc a par exemple été multipliée par vingt. De 1934/38 à 1948/52 la production augmente de 1.6% par an. Cette diminution est due à la crise des années 30 et à la deuxième guerre mondiale où la demande a diminué pour certains produits. De 1950 à 1970 elle augmente de 3.3% par an et entre 1970/95 elle connaît à nouveau un sérieux ralentissement pour n'atteindre plus que les 2.3% par an. Les exportations ont encore plus diminué mais ceci on va le voir plus tard.
Au long du XXième siècle a eu lieu une redistribution des aires géographiques de production. Ainsi le cacao et le caoutchouc étaient au début du XXième siècle étaient le quasi-monopole de l'Amérique latine. Tandis que dans les années 50 l'Afrique produisait 65% de la production mondiale de cacao et l'Asie l'essentiel du caoutchouc. La Malaisie est apparue et est très vite devenue un exportateur important de produits tropicaux.
Nous allons maintenant étudier plus en détail quelles sont les causes de ce ralentissement de la production de produits tropicaux après les années 70.
2.3.1.2 Les causes du ralentissement
La saturation des besoins du monde développé est une des causes. Ainsi on peut citer la consommation européenne (sans la Russie) de sucre qui stagne depuis les années 70 autour de 40kg par habitant. Elle n'était que de l'ordre de 12kg par habitant au début du XIX siècle. De même pour le café dont la consommation en Europe par habitant n'était que de 1.7kg au début du XIX siècle, elle stagne autour des 4.5kg au début des années 70.
La deuxième cause c'est l'augmentation de la productivité agricole des pays développés occidentaux supérieure à celle des pays du Tiers Monde malgré la différence des coûts de travail les coûts de production du Tiers Monde sont supérieurs à ceux de l'Occident. Ainsi le coton, les oléagineux et le sucre reculent. Leurs principaux concurrents sont pour les deux premiers les Etats-Unis et pour le dernier l'Europe. Le sucre était jusqu'au début des années 70 le principal produit d'exportations mais vers 1990 il représentait moins d'1/5 en terme de volume.
2.3.2 Les cultures vivrières
2.3.2.1 Une croissance faible et irrégulière
Si on analyse l'évolution de la production alimentaire par habitant on constate que globalement la croissance était très faible mais aussi très irrégulière. Cependant le taux de croissance de la production alimentaire totale est quand même relativement élevé si on le compare avec celui des pays développés occidentaux pendant la première phase d'industrialisation. Le problème de l'inflation démographique apparaît ici mais on va l'étudier plus en détail dans une autre partie. On trouve de nouveau des différences régionales. L'Amérique latine connaît une progression régulière mais faible, celle de l'Asie est plus forte tandis que l'Afrique est même en recul.
2.3.2.2 Le déficit alimentaire et ses causes
Cette quasi-stagnation de la production alimentaire par habitant a conduit à un déficit commercial croissant essentiellement pour les céréales. Ainsi le déficit céréalier représentait pour 1988/92, 26% de la production pour l'Afrique Noire, 25% pour l'Amérique latine (sans l'Argentine qui est un important producteur) et 5% pour l'Asie. A ce déficit s'est rajouté depuis 1970 un déficit croissant d'autres produits alimentaires essentiellement d'élevage (viande, produits laitiers etc.)
Comme cause on peut citer l'inflation urbaine qui sera traité plus loin. Puis l'aide alimentaire dès 1960 des pays développés occidentaux qui a stagné en 1980 car les pays développés se sont aperçus qu'elle décourageait les efforts locaux en matière agricole. Ainsi que le contact accru avec le mode de vie occidental qui a modifié certaines habitudes de consommation et enfin la forte augmentation de la productivité dans les pays développés occidentaux par rapport à la faible progression des pays du Tiers Monde. Essentiellement à cause de l'inflation démographique. Vu les capacités d'absorption insuffisantes des autres secteurs, la population agricole a augmenté. La superficie agricole n'ayant augmenté que très faiblement on observe une diminution de la superficie par actif agricole et donc une faible croissance de la productivité. Le problème est d'autant plus grave vu la faible disponibilité des terres cultivées en général.
La révolution verte a permis la mise au point de variété de céréales à haut rendement adaptées aux climats tropicaux ou semi-tropicaux. Les gains de rendement ralentiront pourtant vers 1985. Cette révolution n'a pas impliqué une augmentation de la productivité. Un des points négatifs de cette révolution est l'augmentation du clivage entre paysans riches et pauvres. Les premiers ayant plus de facilités à payer les coûts additionnels des nouvelles semences. On va traiter maintenant l'exemple de la Chine.
2.3.2.3 La Chine: Une évolution plus positive
Pour la Chine la première moitié du XX siècle a été une phase très négative pour l'agriculture. La production par habitant a même reculé. La deuxième moitié du XX siècle qui est celle de la Chine communiste a été plus positive. Contrairement au Tiers Monde à économie de marché ou la priorité était mise sur l'industrie la Chine favorise l'agriculture. La conséquence fut une évolution de la production par habitant plus positive que celle du Tiers Monde à économie de marché. Après la mort de Mao en 1976 des politiques de libéralisation ont été mises en place et ont conduit à une accélération de la production agricole par rapport à un Tiers Monde à économie du marché stagnant. En Chine 80% de la population active était employé dans le secteur agricole en 1970 contre 72% en1990. Le secteur agricole reste prépondérant.
2.4 L'évolution du secteur industriel
On va faire dans cette partie distinction entre les industries manufacturières et celles extractives.
2.4.1 L'industrie extractive
2.4.1.1 Une évolution positive surtout grâce au pétrole mais sans effets majeurs sur le reste de l'économie
La production des industries extractives est essentiellement destinée à l'exportation. (Donc elle ne concerne pas la Chine) Entre 1900 et 1948 la production du secteur minier a connu une phase d'expansion très forte. Ceci est principalement du à la forte croissance du pétrole et du minerais de fer. Le pétrole commence à prendre le dessus sur le charbon. La phase de 1948 à 1973 est caractérisée par une accélération de l'exploitation, celle-ci a des taux de croissance de 8% par an. Cette accélération est surtout la conséquence d'une forte augmentation du pétrole. Les anciens producteurs de pétrole ont augmenté leur production et de nouveaux producteurs sont apparus. L'accélération de la production de l'industrie extractive n'était pas due à une augmentation du besoin de l'industrie locale mais à l'augmentation de la demande parvenant des pays développés. La part du Tiers Monde a donc augmenté graduellement dans la production extractive mondiale. Les principales causes de cette progression du secteur minier étaient la diminution des coûts de transport et l'épuisement des gisements les plus riches et les plus rentables dans les pays développés occidentaux. Mais les effets induits du secteur minier sur le reste de l'économie étaient marginaux. Les risques de troubles politiques empêchaient les sociétés d'étendre leurs activités en aval et ces sociétés à capitaux étrangers dominants essayaient de rapatrier la part la plus importante du bénéfice. L'emploi dans ces sociétés était très faible vu les techniques avancés utilisées.
2.4.1.2 Les causes du ralentissement
Entre 1973 et 1991 il y a un recul de la production, les causes étant une augmentation des prix de pétrole, un ralentissement de la croissance économique dans les pays développés occidentaux et une saturation des possibilités d'exportations des minerais après une phase de substitution rapide des mines du Tiers Monde à celles des pays développés occidentaux.
2.4.1.3 La reprise par les combustibles
La reprise de l'expansion a lieu entre 1992/95, celle-ci est principalement entraînée par l'expansion des combustibles.
2.4.2 L'industrie manufacturière : Une prédominance des secteurs traditionnels
2.4.2.1 Une évolution positive jusqu'aux années 1970
La colonisation au cours du XIX siècle a entraîné un déclin de l'industrie traditionnelle. En 1900 quatre pays avaient une base industrielle importante, l'Inde, la Chine, le Brésil et le Mexique. Durant la première guerre mondiale une diminution des exportations des pays développés favorise l'industrialisation. Mais comme les exportations des pays développés occidentaux en bien d'équipement diminuent également, le Tiers Monde connaîtra seulement une utilisation plus intense du potentiel industriel existant. Ceci explique l'augmentation qu'on aperçoit en 1938. Il en résulte essentiellement une expansion de la filature de coton et de la sidérurgie. Aux quatre producteurs ayant une base industrielle se rajoute la Corée. Au cours des années 30 on assiste à de nouvelles tentatives gouvernementales en Iran, Thaïlande, Turquie et Bolivie. Il s'agit de secteurs très proches de la consommation et à technologie assez simple. Pendant les années 30 les quatre pays qui ont une base industrielle connaissent une faible progression. L'indépendance politique vers 1950 de nombreuses colonies a entraîné une forte accélération de l'industrialisation. Même si on ne considère pas les 'quatre dragons' on a encore des taux de croissance supérieurs à ceux des pays développés occidentaux dans leur phase de démarrage. Depuis 1975 on assiste à un ralentissement de l'expansion industrielle. L'Amérique latine et l'Afrique ont été essentiellement touché.
En 1950 l'emploi industriel manufacturier dans le Tiers Monde à économie de marché occupe 7,4% de l'emploi total (9,5% dans l'ensemble du secteur secondaire) contre 11,3% en 1990 (16,1% dans l'ensemble du secteur secondaire). Sur le plan régional l'Amérique latine (surtout au Mexique et au Brésil) a le plus développé ce secteur car il occupe 14% de l'emploi total, tandis qu'en Afrique seulement 6% et en Asie à économie planifiée 1990. La faiblesse de l'emploi industriel s'explique par l'inflation démographique. Ainsi si entre 1950/70 la population n'aurait augmenté que de 0.6% par an avec le même rythme de développement industriel le taux d'épongeage aurait atteint les 70%. Donc ce faible taux du Tiers Monde à économie de marché ne s'explique pas par une industrialisation moins rapide. Parallèlement l'introduction de tracteurs ou de moissonneuses ou de machines en général a souvent été non justifiée vu le sous-emploi agricole, les prix relativement élevés des machines et la forte proportion des importations.
2.4.2.2 Les causes du ralentissement
Dès le début des années 70 les limites de substitution des importations sont atteintes pour les biens que le Tiers Monde est en mesure de produire sans problèmes majeurs. La division internationale du travail est de telle manière que le Tiers Monde produit des articles provenant de l'industrie traditionnelle (textile, chaussures, etc.). Mais la demande de ces biens augmente moins vite que celle des produits manufacturés de haute technicité produits par les pays développés occidentaux.
2.4.2.3 Une production essentiellement concentrée sur une minorité de pays
Au début des années 70 avant que l'expansion industrielle très rapide des quatre dragons n'amène ces pays à occuper une place importante on constate que ces derniers avec le Brésil et le Mexique étaient responsables du tiers du potentiel industriel du Tiers Monde. En 1995 les quatre dragons, dont la population ne représente que 3% de celle du Tiers Monde concentrèrent plus du quart de la production manufacturière de cet ensemble et fournirent près de la moitié des exportations de ces produits. Ils ont connu une industrialisation très rapide dès les années 70 grâce à l'exportation celle-ci n'a été possible qu'à cause de leur faible taille. Ils ont réussi à passer des secteurs traditionnels à ceux de technologie de pointe. Voyons de nouveau ce qui se passe en Chine.
2.4.2.4 Chine : Une évolution plus positive
La période de 1913 à 1949 est une période de stagnation du niveau d'industrialisation et vers 1949 il sera voisin de celui des pays du Tiers Monde à économie de marché. Mais en 1976 à la mort de Mao il sera supérieur de quelque 65 à 75% du niveau moyen du Tiers Monde à économie de marché. En plus son industrie est plus diversifiée et plus équilibrée que celle du reste du Tiers Monde. Après 1976 le pays prend des mesures de libéralisation. La croissance est alors tellement rapide qu'en 1995 la Chine est le pays le plus industrialisé du Tiers Monde si on exclue les quatre dragons. En 1995 elle est devenue le premier exportateur de produits manufacturés du Tiers Monde et le dixième au niveau mondial. Le taux de la population active dans le secteur secondaire est de 10% en 1970 contre 13% en 1990.
2.5 L'évolution hypertrophique du tertiaire
Entre 1950 et 1990 la population active travaillant dans le tertiaire s'est multipliée par quatre. L'essentiel de l'activité du tertiaire se fait dans les villes. En 1950 il occupe 14,5% de la population active contre 29% en 1990 dans le Tiers Monde à économie de marché. Le taux de la population active occupée dans le secteur tertiaire est donc supérieur à celui du secteur secondaire. Il est extrêmement élevé en Amérique latine ou il est de 51%. En Chine les chiffres sont moins élevés ils étaient de 10% en 1970 et de 13% en 1990. Cette forte expansion a conduit à l'hypertrophie du tertiaire. Les causes en sont d'un côté le développement pléthorique de la distribution commerciale et des services publics dans la plupart des pays concernés et d'autre part par l'impossibilité du tertiaire d'absorber le total du surplus d'actifs de l'agriculture. Cette hypertrophie peut être considérée comme le résultat de la croissance trop importante des villes.
2.6 L'évolution du commerce extérieur (on laisse de côté la Chine et les autres pays communistes)
Dans le Tiers Monde à économie de marché les échanges intrarégionaux restent faibles. Ils ont augmenté durant les fortes augmentations du prix du pétrole à 30%. Mais en 1990 constitutif aux diminutions du prix du pétrole les échanges intrarégionaux se situaient de nouveau à 25%. Les trois quarts du commerce sont faits avec les pays développés occidentaux tandis que leurs échanges avec le Tiers Monde ne représentent que 20%. Les rapports économiques sont donc dissymétriques et permettent aux pays développés occidentaux de privilégier leurs intérêts au détriment de ceux des pays du Tiers Monde. Pour ce qui est de la Chine de 1900/48 son commerce extérieur était extrêmement faible. Ainsi ses exportations représentaient en 1948 même pas 1% de celles de l'ensemble du Tiers Monde. Puis il y a eu une expansion rapide des échanges avec les pays de l'Est jusqu'à la rupture en 1960 avec l'URSS. De1970/95 les exportations ont rapidement augmenté de manière à devenir en 1995 comme nous l'avons vu le premier exportateur de produits manufacturiers.
2.6.1 Les exportations
2.6.1.1 Une évolution positive jusqu'en 1952
La période de 1900 à 1952 était une phase d'expansion rapide due à l'expansion des exportations de produits agricoles tropicaux et au début d'exportations plus massives de matières premières. La balance commerciale a son apogée en 1928. En Afrique Noire la progression est très forte tandis qu'en Afrique du Nord les exportations diminuaient. L'amélioration touche aussi l'Amérique latine et l'Asie. De 1952/72 les exportations diminuent constamment malgré la forte augmentation d'exportation du pétrole. Il y a une augmentation de la part relative des exportations de l'Afrique tandis que celle de l'Amérique latine diminue et celle de l'Asie reste stable.
2.6.1.2 Les causes du ralentissement
Une des causes était une période exceptionnellement rapide d'expansion des échanges des pays développés. Le Tiers Monde à économie de marché n'a donc pas diminué ses exportations mais il n'a pas pu tirer pleinement profit de la très forte expansion des échanges internationaux. Une autre cause était que jusqu'au milieu des années 70 trois quarts des produits exportés étaient des produits bruts agricoles ou miniers alors que pour les pays développés ces produits représentaient seulement un quart. Comme on l'a déjà vu leur demande augmente moins fortement que celle des produits manufacturés à forte intensité technologique. En plus se réalise le phénomène décrit par Ernst Engel qui dit qu'avec le progrès technique la quantité de matières premières utilisées pour produire des articles finis diminue. Ce phénomène n'apparaît qu'en 1950 car les produits exportés sont essentiellement des produits de luxe dont la demande était pourtant progressivement saturée. La période de 1972/95 est elle caractérisée par les fortes hausses de pétrole.
2.6.1.3 Le choc pétrolier et la division en pays exportateurs de pétrole et non exportateurs de pétrole
Dès les années 70 il faudra distinguer les pays exportateurs de pétrole, qui ne représentent qu'une faible part de la population du Tiers Monde à économie de marché dont l'excédent augmente fortement de 1970/74, et les pays non exportateurs de pétrole dont le déficit dès les années 60 est en progression à cause des hausses du prix de pétrole et de la détérioration de leurs termes des échanges par rapports aux articles manufacturiers.
Entre la période 1974/78 l'excédent des pays exportateurs de pétrole diminue à cause de la forte hausse des importations mais avec le deuxième choc pétrolier l'excédent est de nouveau fortement rétablit jusqu'en 1980. Cet excédent recule de nouveau entre 1980 et 1995 avec la baisse du prix du pétrole et une stagnation de sa consommation.
Les pays exportateurs de pétrole n'ayant plus atteints le niveau des années antérieures et à cause de la baisse des prix des autres produits, l'ensemble du Tiers Monde note en 1995 un déficit de 7% des importations.
2.6.1.4 L'expansion des exportations de l'Asie et le recul de l'Afrique et de l'Amérique latine
De 1970 à 1995 la part de l'Asie a augmenté dans les exportations totales du Tiers Monde à économie de marché (46% à 75%) tandis que celle de l'Amérique latine et de l'Afrique ont diminué respectivement de 20% à 18% et de 22% à 7%. Les causes sont multiples. Il y a le déclin des produits agricoles parallèlement à une forte augmentation des exportations du pétrole et de produits manufacturiers qui est pourtant essentiellement due aux quatre dragons, Chine, Brésil, Mexique, Indonésie, Malaisie et Thaïlande. Puis il y a l'apparition de produits de synthèse qui débute au XIX siècle avec le sucre de betterave et continue au XX siècle avec le caoutchouc, les fibres textiles et les oléagineux.
2.6.2 Les importations
Durant le XIX siècle et la première moitié du XX siècle les articles manufacturiers constituent l'essentiel des importations de toutes les régions du Tiers Monde à économie de marché. Les produits manufacturés représentaient environ les trois quarts du total. Ils étaient essentiellement composés de biens de consommations, notamment de produits textiles. Les biens d'équipements étaient surtout du matériel de transport. Le quart restant représentait une grande variété de biens allant du charbon aux céréales. Pendant la période de 1950 à 1990 la structure des importations a peu changé : 70% sont toujours des produits manufacturiers. Mais la proportion de biens d'équipements a augmenté tandis que celle des biens de consommation a diminué. En plus il y a eu une augmentation des achats de produits alimentaires et notamment de céréales de la part des pays du Tiers Monde à économie de marché dans les pays développés.
2.7 Les problèmes majeurs du Tiers Monde
2.7.1 L'évolution de la population
2.7.1.1 L'inflation démographique
A partir de la deuxième guerre mondiale l'éventail médical et les possibilités de contrôle de certains parasites se sont considérablement élargies. Le taux de mortalité diminue fortement et l'espérance de vie augmente fortement. Ceci a entraîné une forte augmentation de la population. Le Tiers Monde a doublé en 29 ans tandis que l'Europe l'a fait en 90 ans. De 1900/70 l'Amérique latine a connu l'augmentation la plus forte, suivi par l'Afrique qui dépasse même les taux d'accroissement maximums de l'Amérique latine. Ce sera aussi le seul continent qui ne va pas reculer entre 1980-1990, et sa situation s'est même accélérée durant les années 90. L'Asie était pendant tout le siècle le continent à croissance démographique le moins rapide. Il existe de fortes différences entre pays : ainsi ceux à religion musulmane et à religion catholique ont par exemple connu les progressions les plus rapides. On a mis en place des mesures pour ralentir l'inflation démographique par exemple en contrôlant les naissances.
2.7.1.2 Les mesures restrictives
Les pays où la religion dominait l'appareil politique étaient opposé à toute mesure de planning familial. On était même favorable aux mesures propres à l'augmentation de la natalité. C'était notamment le cas des pays islamistes. Mais là aussi les attitudes changent. C'est ainsi que depuis 1986 l'Iran ne favorise plus les naissances. On a compris que sans ces contrôles des problèmes d'éducation, de santé, économiques et culturels apparaissent. Pour ce qui est des résultats on constate que sur l'ensemble du Tiers Monde en 1990, 53% des couples dont la femme est en âge de procréer utilisent une méthode de contraception. En Afrique Noire 18% et en Asie de l'Est 79%. Mais la baisse de la mortalité a été encore plus rapide. C'est en Amérique latine que la baisse de l'indice de fécondité a été le plus fort passant de 5.9% à 3.1%. Par contre en Afrique Noire on a même assisté à une augmentation de la fécondité jusqu'au milieu des années 70 et par après la baisse a été modérée (0.1%). L'Asie a économie de marché a connu une diminution de 6% à 3.8%.
2.7.1.3 La politique nataliste à l'enfant unique de la Chine
La croissance démographique a été plus modérée durant le XX siècle que dans le reste de l'Asie à régime plus libéral. Pourtant l'augmentation de la population a été supérieure à celle prévue. De 1965/70 à 1985/90 l'indice de fécondité a diminué de 5.93% à 2.38% et de 1992/95 la population n'a augmenté que de 1% l'an. Depuis la conférence de mars 1994 sur la planification de la population, les familles rurales ont la possibilité d'avoir deux enfants si le premier a été une fille. La cause en est l'infanticide des filles. Ce qui a aussi changé c'est que dorénavant le contrôle des naissances est considéré comme une nécessité pour le développement économique. Notamment à cause de l'insuffisance de terres cultivables et des problèmes qui sont apparus dans le domaine de l'emploi, de l'éducation, du logement, des transports et de la santé avec l'accroissement démographique.
2.7.2 L'évolution urbaine
2.7.2.1 Une évolution rapide sans justification
Durant le XX siècle l'augmentation de la population urbaine était supérieure à l'augmentation de la population totale. Ainsi entre 1910/50 le taux d'urbanisation a augmenté de 1.2% par an et entre 1950/90 de 2.1% par an. Il a été le plus élevé pour l'Amérique latine et le Tiers Monde à économie de marché a connu une évolution plus rapide que le reste du Tiers Monde. Mais il n'y a aucune justification à celle-ci. Dans les pays développés le taux d'urbanisation est dû à l'industrialisation et à la productivité agricole tandis qu'au Tiers Monde l'économie stagne. La conséquence est l'explosion des grandes villes et l'apparition du phénomène des bidonvilles surtout à partir des années 60. L'ampleur de ce phénomène est largement supérieure à celui des ouvriers européens du XIX siècle.
2.7.2.2 Les causes et les conséquences
Les causes de l'inflation urbaine sont l'exode rural, l'augmentation naturelle de la population urbaine et les mouvements migratoires. La densité des terres agricoles s'est amélioré pendant le XX siècle donc elle ne peut pas être le seul facteur explicatif. Des revenus plus élevés en ville sont une des causes. En plus beaucoup de jeunes sont en présence de parents analphabètes à cause de la forte évolution de l'enseignement. Ils croient que le fait de savoir lire et écrire doit impliquer l'abandon du milieu rural. Souvent les services offerts en ville sont inexistants ou peu développés. Ces services attirent beaucoup de gens qui croient accéder en ville au monde développé. Enfin la décolonisation a été un élément important de l'accélération de l'urbanisation car elle a supprimé les droits d'installation dans beaucoup de villes. La conséquence de cette accélération de l'urbanisation fut un chômage urbain, touchant surtout les jeunes, supérieur à celui rural dès les années 60 et l'hypertrophie du tertiaire.
2.7.2.3 La Chine: Une accélération avec la libéralisation
Pour ce qui est de la Chine elle connaît des taux d'urbanisation inférieurs au reste de l'Asie tandis que sa progression est plus rapide. Avant la première moitié du XX siècle l'évolution urbaine de la Chine ne diffère pas fortement de celle du reste du Tiers Monde. Pendant la phase communiste de 1949/76 on essayait de réguler l'évolution urbaine. Avec la libéralisation l'urbanisation s'est accéléré. L'exode rural s'est surtout accéléré notamment à cause de l'écart croissant entre niveau de vie des campagnes et celui des villes à forte poussée industrielle. On assiste aussi à l'apparition de quasi-bidonvilles et d'un sous emploi urbain.
2.7.3 Une instabilité des prix d'exportations de produits bruts plus importante
Les exportations du Tiers Monde à économie de marché ont une forte composante de produits bruts qui sont plus susceptibles de réagir aux prix. Les produits bruts du Tiers Monde à économie de marché subissent des fluctuations de prix plus fortes que les produits produites par les pays développés occidentaux. La variation des prix d'exportations dépend donc fortement des différents produits. La conséquence est une instabilité des recettes d'exportations, vu la place prédominante de ces produits. Ainsi le Tiers Monde à économie de marché a subi entre 1973/95 six reculs de prix contre deux pour les pays développés occidentaux. Des programmes de stabilisation ont été mis en place mais leurs effets ont été assez limités.
2.7.4 L'évolution des termes des échanges
2.7.4.1 Une évolution positive jusqu'en 1952
Durant la période des années 1870 à 1930 tant au niveau des termes des échanges des pays individuels du Tiers Monde à économie de marché qu'à celui des groupes de produits bruts on a assisté à une amélioration des termes des échanges. Si on exclut la grande crise et la guerre ceci se poursuivit jusqu'au milieu des années 50. Pendant les années 30 le recul des prix d'exportation a été plus important pour les produits manufacturiers. Ceci explique la détérioration des termes des échanges du Tiers Monde à économie de marché qui est essentiellement exportateur de produits bruts. L'évolution des prix des différents produits bruts était de loin pas uniforme, bien que tous étaient touchés par des diminutions de prix. De 1946/52 les prix augmentent fortement consécutive à la guerre de Corée. Pendant cette période il y a une amélioration des termes des échanges. Les prix se normalisent en 1952 ce qui entraîne un recul des termes des échanges de 13%. Cette détérioration continue jusqu'en 1962. Entre 1962 et 1973 il y a une relative stagnation des termes des échanges mais celle-ci se fait près des niveaux les plus bas atteints depuis la fin de la guerre.
2.7.4.2 Les causes de la détérioration
Les causes sont énumérées dans l'ordre croissant de leur importance. Premièrement il y a une très forte augmentation de l'offre des matières premières produites par le Tiers Monde à économie de marché. Ensuite les bénéfices résultant de l'augmentation de productivité des matières premières produites sont affectés autrement que ceux des produits manufacturés. Ainsi ces derniers étaient utilisés pour des augmentations de salaires et de bénéfice tandis que les premiers étaient utilisés à des baisses de prix à cause de la pression forte des acheteurs provenant des pays développés. Une troisième cause est la mise au point et la production sur une grande échelle de produits de synthèse. Les causes qui suivent maintenant avaient un impact moindre. La relative inélasticité de la demande des produits bruts par rapports à celle des produits manufacturiers. Les besoins en produits bruts ont vite atteint un plafond. Les deux dernières causes sont une réduction des coefficients de l'input des matières premières dans l'industrie manufacturière causé par le progrès technique et les mesures restrictives à l'importation et à la consommation de certains produits originaux du Tiers Monde à économie de marché dans les pays développés occidentaux (café, tabac, thé).
2.7.4.3 Le choc pétrolier et la division en pays exportateurs de pétrole et non exportateurs de pétrole
Pendant la période de 1973/81 les pays non exportateurs de pétrole ont connu des détériorations de leurs termes des échanges tandis ceux exportateurs ont connu des améliorations grâce à la forte hausse des prix de pétrole.
Les termes des échanges des pays exportateurs de pétrole ont connu des chutes et des reprises de 1981/94. En 1995 ces termes étaient de nouveau en baisse et se situaient à un peu moins de la moitié du sommet de 1981/83 mais encore deux fois et demie plus élevée que le niveau d'avant la hausse du prix du pétrole de 1973/74.
Pour les pays non exportateurs la détérioration a continué jusqu'en 1994. L'Amérique latine était la plus touché avec un tiers de recul contre un cinquième pour l'Afrique, l'Asie se situant dans la moyenne du Tiers Monde à économie de marché. L'amélioration pour pratiquement tous les prix de produits bruts est due, selon les spécialistes, à la spéculation.
2.7.5 Une courte note sur la dette
Dans les aides accordés aux pays du Tiers Monde les aides elles-mêmes étaient minoritaires tandis que les prêts à intérêt majoritaires. Ceci concerne essentiellement le Tiers Monde à économie de marché. La dette a commencé à augmenter fortement dès 1950. Les deux causes principales sont la détérioration des termes des échanges et le déficit commercial qui en résultait. L'augmentation du prix du pétrole a fait augmenter le besoin d'aide. Mais l'inflation des prix du pétrole a fait augmenter les taux d'intérêt ce qui a fait exploser le service de la dette, pour celles qui étaient à taux flottants. La diminution des taux d'intérêts dès 1982 n'a pas pu diminuer le service de la dette. Les pays les plus touchés dans l'ordre croissant à la fin de 1993 étaient : Brésil, Mexique, Inde, Indonésie, Argentine, Turquie. Différentes mesures comme le plan Brady ou en 1994 le Club de Paris ont été mises en place pour remédier à ce problème.
Pour la Chine la dette était très faible avant 1985 mais après elle a commencé à augmenter à un rythme très élevé. Malgré l'ampleur restreinte de la dette le service de celle-ci affecte sensiblement la recette extérieure à cause de la faiblesse des taux d'exportations.
2.8 Un bilan positif pour l'enseignement
2.8.1 Le taux d'analphabètes en forte baisse
Entre les deux guerres des mesures en faveur de l'éducation s'intensifient presque partout dans le Tiers Monde et avec l'indépendance politique retrouvé les gouvernements en ont fait une priorité. Entre 1900/50 ce taux a peu évolué, tandis qu'entre 1950/95 il est passé de 72% à 30%. En Amérique latine on a fait les progrès les plus élevés tandis qu'en Afrique ils étaient les plus faibles. Il y a de fortes différences entre pays, sexe et lieu d'habitation (ville, campagne). En Chine le taux d'analphabètes a plus fortement diminué que dans le reste de l'Asie. Cette forte baisse est due à l'extension de l'enseignement.
2.8.2 Une évolution positive pour l'enseignement scolaire, secondaire et universitaire
Pour le Tiers Monde à économie de marché le taux brut de scolarisation dans l'enseignement primaire a évolué de 15% en 1939 à 100% en 1990. Dans l'enseignement secondaire il est passé de 3% à 48% sur la même période et est proche de celui de l'Europe occidentale en 1950. Il y a cependant de fortes divergences entre pays et régions. Ainsi le taux brut de scolarisation dans l'enseignement secondaire en Afrique est inférieur à celui du reste du Tiers Monde. Ceux de la Chine et d'autres pays communistes sont proches de ceux du Tiers Monde a économie de marché. Les progrès dans l'université ont été rapide même s'ils n'atteignent pas ceux de l'enseignement secondaire. Les progrès au Tiers Monde à économie de marché ont été supérieurs à ceux de la Chine qui pratique une politique délibérée afin de réduire les risques de dissidence politique. La progression a surtout été forte pendant la période de 1950/90. Les progrès de l'Amérique latine sont supérieurs à ceux de l'Asie qui sont supérieurs à ceux de l'Afrique. Certains pays d'Amérique latine, essentiellement les pays tempérés avaient des taux de scolarisation universitaires supérieurs à la moyenne des pays développés. Il existe de nouveau de fortes divergences entre pays. Le processus de scolarisation à tous les niveaux a été deux à trois fois plus rapide que dans les pays occidentaux en dépit de contrainte démographique. Depuis 1980 on assiste à un net ralentissement du rythme de progression tant au niveau secondaire qu'universitaire. Les progrès ont été également très rapides dans l'enseignement technique.
3 Cas de croissance particulier dans deux pays
3.1 Le Japon : un pays qui contrairement aux pays du Tiers Monde a réussi grâce à une croissance de la population et une importation massive de technologies occidentales
Le modèle japonais est un modèle d'industrialisation par l'exportation. Le Japon connaît un essor considérable pendant la première guerre mondiale. Ceci est essentiellement dû à l'effacement momentané de l'Europe. Ainsi de 1910/14 à 1920/24 la production de l'industrie textile augmente de 85%, celle de la métallurgie de 144%, celle de l'industrie chimique de 152%. A l'occasion de la guerre le Japon a pu étendre ses marchés extérieurs. Il exporte des produits semi-manufacturés et du textile vers l'Occident, et des biens de consommation et de quelques machines en concurrence avec l'Europe vers l'Asie. D'autre part il importe des biens d'équipements élaborés en Occident et des matières premières et des produits alimentaires d'Asie. Le Japon est caractérisé par une pauvreté en matières premières et en terres cultivables. Il a pratiquement échappé à la grande dépression des années 30. Dans la période de 1918/22 à 1933/37 le revenu national a augmenté de 85%, tandis que le revenu national par tête a seulement augmenté de 60%. La cause est la forte croissance démographique. La répartition du revenu national s'est modifié pendant cette période. Désormais et tout au long du XXième siècle le secteur le plus important est celui tertiaire suivi par le secondaire et le primaire. L'importance du tertiaire s'explique par l'existence d'un commerce de détail et un artisanat archaïque. Dans le secteur secondaire la production énergétique et la chimie, tous les deux des secteurs modernes se développent très fortement. La métallurgie et la construction mécanique occupent une position moyenne et le textile connaît un développement faible.
Le Japon est caractérisé par une coexistence de firmes extrêmement puissantes, les zaibatzu et des petites entreprises très dispersées. Dès le début du XXième siècle ces premiers prennent des structures de sociétés holding qui sont présent dans les secteurs les plus divers allant du secteur industriel au secteur bancaire. Une telle société est un groupe familial qui crée des organisations oligopolistiques du marché. Mais après la guerre ils sont dissous et démembrés. Aujourd'hui ce sont les kiiretsu constitués en vastes 'firmes réseaux' sans statut juridique, qui représentent la puissance du capitalisme japonais. Ils peuvent prendre des formes de groupement horizontaux ou verticaux. La cohésion de ces groupes est réalisée par un système de participations croisées qui lie les entreprises les unes aux autres et par l'action de la banque et des organismes financiers et enfin par les 'comités' ou 'clubs' qui réunissent les dirigeants des principales firmes et assurent la coordination de l'ensemble. Les petites entreprises se sont progressivement spécialisées dans la sous-traitance. Ils sont caractérisés par des tâches abondantes en main-d'�uvre plutôt que par une technologie avancée. Leur rentabilité s'explique surtout par la non-applicabilité des lois sociales. La croissance de la population et le sous emploi agricole livrent une main-d'�uvre bon marché aux industries.
A partir de 1945 les autorités japonaises prennent des mesures restrictives pour contrôler l'inflation démographique. Les causes de l'inflation sont une favorisation de la croissance démographique pendant la II guerre mondiale et la baisse du taux de mortalité. Tandis qu'aujourd'hui les problèmes du Japon résultent d'un faible taux de croissance naturelle qui met en place une situation de pénurie de main-d'�uvre jeune. Le financement de la reconstruction industrielle est essentiellement monétaire et assuré par la Banque du Japon.
Il y a cinq facteurs qui expliquent la forte croissance du Japon après la deuxième guerre mondiale.
1) Dès 1950 commence le rattrapage technologique du Japon. Il importe massivement les techniques étrangères et économise ainsi les coûts de recherche grâce à une main-d'�uvre qualifiée et à la capacité d'adaptation de ses chefs d'entreprises il a réussi à assimiler les technologies les plus perfectionnées. Entre 1953 et 1995 le niveau d'industrialisation est multiplié par 14 et présente en 1995 67% du niveau d'industrialisation américain. Désormais le Japon enregistre parmi les pays développés la plus forte croissance des dépôts de brevets à l'étrangers notamment sur le marché des Etats-Unis. Les dépôts se font même à un rythme supérieur à celui des américains dans leur propre pays. Ainsi en 1992 la recherche atteignait 3% du PIB contre 1.5% en 1972. De plus 80% de la recherche est faite par les grands groupes. Le Japon investit beaucoup ainsi en 1990 son taux de formation brute de capital fixe était de 32% du PIB deux fois plus élevé que celui des Etats-Unis. De 1950/65 le Japon investissait principalement dans l'industrie lourde et le textile, de 1965/75 dans le secteur automobile et l'électronique à grand public et dès les années 80 surtout dans la technologie de pointe. Comme on l'a déjà dit au début le Japon c'est un modèle d'industrialisation par l'exportation. Depuis les années 60 ses exportations ont fortement augmenté et sa balance commerciale est devenue largement excédentaire. Aujourd'hui il est le troisième exportateur mondial. Il maintient ses forts taux de croissance qui étaient de 10% par an entre 1950 et 1970 principalement par les forts taux d'exportation. Ceci fragilise notamment son économie. Le Japon est caractérisé par un taux de chômage plus faible que les autres pays développés.
2) L'industrie et le tertiaire moderne peuvent compter sur une disponibilité en main-d'�uvre. Celle-ci coûte peu comme on l'a déjà noté. L'investissement et le perfectionnement des techniques ont provoqué une amélioration rapide de la productivité globale du travail et du capital. La productivité a augmenté plus vite que les salaires contrairement à ce qui s'est passé dans l'Occident. Ceci a permis un important réinvestissement et a renforcé la compétitivité des exportations japonaises. Pendant les chocs pétroliers le Japon a réagi avec une politique restrictive des revenus.
3) Le dualisme de l'économie japonaise : des salaires élevés, une pratique de l'emploi à vie et une rémunération à l'ancienneté dans les grandes entreprises et des rémunérations beaucoup plus faible et une sécurité de l'emploi précaire dans les secteurs traditionnels.
4) La forte interconnexion entre l'Etat et la grande entreprise entraîne une élaboration de plans quinquennaux spécifiques au moment.
5) Les taux d'épargne du Japon sont les plus élevés du monde industrialisé. Ils sont accompagnés de prêts bancaires à long terme et à bas taux d'intérêt ce qui permet un taux d'investissement élevé. Mais depuis les années 80 le système bancaire japonais connaît des problèmes à cause de ses nombreuses créances douteuses et des problèmes de solvabilité. Les causes de taux d'épargne si élevés sont des aspects culturels mais essentiellement une couverture sociale très faible des charges liées à la maladie, la vieillesse et à l'éducation scolaire des enfants.
Depuis les années 90 le Japon connaît un ralentissement de sa croissance économique. L'économie enregistre une stagnation de la demande et un ralentissement des investissements privés.
5.1 La Russie : une croissance planifiée
Vers 1913 la Russie avait un retard important de son développement économique non seulement par rapport aux régions les plus développées mais aussi par rapport à celles qui l'étaient moins. Pourtant elle était la quatrième puissance industrielle derrière les Etats-Unis, l'Angleterre et l'Allemagne. Mais du point de vue du PNB par habitant elle était seulement un tiers de celui des Etats-Unis et un demie de celui de la France et de l'Allemagne et son niveau d'industrialisation n'était même pas au quart de celui de l'Allemagne. La Russie est une importante exportatrice nette de céréales et la consommation alimentaire de la Russie est relativement abondante grâce aux céréales. Le taux d'analphabétisation de la population âgée de plus de 15 ans était de 70% contre 1 à 3% en Allemagne. Dans l'enseignement universitaire le retard était pourtant moins important. La mortalité infantile était deux fois plus élevée qu'en Europe occidentale. Ceci est principalement dû aux conditions de vie misérables des paysans qui représentaient 80% de la population. A partir de 1890 la Russie a connu une inflation démographique qui a ralenti le processus de développement et appauvrie les paysans.
La période de 1917/21 est la phase du communisme de guerre. Pendant cette phase les terres agricoles sont nationalisées. Les paysans, plus propriétaires ont négligé leurs terres. La famine de 1918 s'ensuivait. Dans l'industrie la direction des entreprises est transférée aux ouvriers. Les banques privées sont aussi nationalisées. La conséquence est une baisse de la production agricole de 50% et de la production industrielle de presque 90%. Ces chiffres doivent pourtant être vus dans le contexte d'une guerre civile. En 1921 il y a eu des révoltes sociales. Des changements provisoires ont été mis en place pour atténuer la transition au système communiste. On y trouve : la dénationalisation des terres agricoles, des entreprises de moins de vingt ouvriers qui représentent seulement 20% de la population active ainsi que du commerce intérieur à moins de vingt ouvriers qui représente 90% de la population active. On s'ouvre aussi plus vers l'extérieur ainsi on fait par exemple appel aux capitaux étrangers. Globalement c'était une réussite, la production agricole, industrielle et le commerce extérieur s'améliorent. Les deux premiers atteignent en 1928 les niveaux de 1913. Pourtant il y a apparition du chômage, pour y remédier l'URSS (URSS = Russie, Ukraine, la Biélorussie, Transcaucasien) met en place un ensemble de législation tel que le congé payé de deux semaines. Dans ce domaine l'URSS était le pays le plus avancé du monde.
Stalin renationalise au début des années 30 les terres l'industrie et le commerce de détail complètement. Progressivement on a mis en place un système de planification. Le bilan en 1958 de cette planification est une réussite. Pour l'industrie lourde et pour l'électricité. Tandis que les biens de consommation ont connu un développement plus modeste. Dans l'agriculture la production de céréales a connu une progression de 20% par habitant de 1926/30 à 1958/62. Tandis que pour les autres produits agricoles l'évolution a été beaucoup plus modeste. La planification a permis de combler une partie du retard de l'URSS qui a connu de 1928 en 1958 un rythme de croissance du PNB par habitant deux fois plus élevée que celui de l'Occident. Ainsi l'URSS dépasse en 1962/64 le niveau d'industrialisation de l'Italie et de l'Espagne. D'autres points positifs sont : une distribution moins inégale des revenus qu'en Occident, un taux d'analphabétisation de plus au moins 0% en 1958, l'absence du chômage, des taux de criminalité de toxicomanie et de prostitution très faible et deux fois plus d'étudiants à l'université qu'en Europe occidentale.
Après la mort de Staline (1953) sous Khroutchtchev les plans deviennent plus indicatifs. On accorde une priorité plus grande à l'agriculture et aux biens de consommation, le critère de profit et d'efficacité est introduit et le secteur privé s'élargit. Mais la libéralisation entraîne un grand nombre de problèmes d'organisation qui se traduisent en 1960 par un ralentissement de la croissance. Actuellement les historiens considèrent que s'était la meilleure décennie de l'histoire soviétique.
Sous Kossyguine il y a eu une reprise de la croissance. Mais dès la fin 1960 il y a eu une forte diminution de la croissance et de la production. Les rigidités dans la planification étant trop fortes. Dès 1972, l'URSS devient une importatrice nette de céréales de plus en plus importante. L'écart entre URSS et Europe occidentale augmente de nouveau. Il y a une décélération du secteur agricole et du secteur industriel. Le taux de mortalité infantile augmente et le taux de scolarisation baisse contrairement à ce qui se passe en Occident.
Gorbatchev essaye de passer à l'économie de marché, tandis que l'économie était en train de s'effondrer. La transition est douloureuse. En 1990 le PNB par habitant recule de 5% le salaire réel de 6% et les prix augmentent de 20%. Les exportations ont reculé de 14% entre 1989 et 1992. Mais c'est qu'en 1994 qu'ils atteignent le niveau de 1988. Ceci est dû à une baisse importante du commerce avec les pays de l'Est qui a diminué d'environ 14% entre 1988. Ceux-ci ainsi que la Russie ont cherché des produits de meilleure qualité en Occident. Le manque de devises a évité une forte augmentation du déficit commercial. L'arrivée massive de produits occidentaux et la diminution du niveau de vie ont aussi diminué la demande interne. L'inflation est devenue très forte le chômage a augmenté. Les investissements étrangers en direction de la Russie ont été faibles. La dette est restée assez réduite et stable. Une forte augmentation des inégalités et une diminution du niveau de vie a conduit à l'apparition massive de la pauvreté. Le taux brut de natalité et l'espérance de vie ont diminué. Le taux brut de mortalité a augmenté.
L'année 1995 sera l'année de la reprise.
En conclusion on peut encore une fois souligner qu'il n'y a donc pas de convergence entre le Tiers Monde et les pays développés occidentaux. Le Japon a réussi contrairement à ce qui s'est passé dans le Tiers Monde. Au Japon la croissance importante de la population n'a pas été un obstacle au développement surtout parce que la population était éduquée. En plus les importations massives de technologies occidentales étaient un facteur majeur explicatif du rattrapage, de nouveau grâce à une main-d'�uvre qualifiée. Et enfin le Japon a réussi à passer des secteurs traditionnels à ceux de technologie de pointe. La même chose s'est notamment produite dans les pays appartenant aux quatre dragons. Mais il faut pas oublier que leur industrialisation est essentiellement basée sur l'exportation. Ceci est naturellement possible qu'à cause de la petite taille de ces pays.
Bibliographie
� Bairoch Paul, 1977, Victoires et déboires III, Coll. Histoire, Folio, Gallimard, Paris
� Bairoch Paul, 1994, Mythes et paradoxes de l'histoire économique, La Découverte
� Lesourd J.A. & Gérard C., 1976, Nouvelle Histoire économique: tome II - le XXième siècle, Armand Collin
� Encyclopaedia Universalis, 1997
� L'histoire au jour le jour: Asie, de l'éveil à la crise (1945-1998), octobre 1998, Le Monde